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12- San Carlos de Bariloche

By 6 février 2023février 25th, 2023Ama'ventura

Le trajet vers Villa Traful, par l’embranchement de la route 40, nous a un peu traumatisés. Or, sachant qu’il n’existe qu’une seule route, et que nous ne voulons pas revenir sur nos pas, nous nous inquiétons de l’état de la piste pour la suite… Quoiqu’il en soit, nous n’avons pas d’autre option que d’y aller, alors après avoir fait le tour de la Ama, vérifié les niveaux, tâté les pneus, fermé les coffres arrière à clé… nous saluons nos amis et prenons la route.

Histoire de conjurer sa peur, c’est Maria qui s’y colle ! Depuis que nous sommes partis, elle m’a volontiers laissé le volant la majeure partie du temps, et surtout, elle n’a jamais conduit sur le ripio… Quoi de mieux que cette belle piste de Traful pour un baptême du feu !

Nous avançons à flanc de montagne, le lac en contrebas. La route est assez large, et il y a moins de trafic que lors de notre arrivée. Maria est concentrée, mais tout va bien. Et avant même de nous en être rendus compte, nous arrivons au bout du lac pour désormais suivre une belle rivière au fond d’une large vallée. 20 km de plus, et nous rejoignons l’embranchement de la Valle Encantado, celle-là même où nous sommes passés juste après notre épisode de surchauffe du radiateur. Nous nous arrêtons au bord de l’eau pour grignoter un bout, sous les pics rocheux qui pointent vers le ciel.

Quel plaisir de retrouver l’asphalte ! La Ama semble elle aussi se détendre et nous emmène follement dans ses pointes à 80 km/h. Nous arrivons à Nahuel Huapi en fin d’après-midi, où l’idée est de recharger en nourriture et  poursuivre vers le Sud en direction d’El Bolson, une étape avant le Parc National Los Alerces qui est notre prochain objectif. Le plein de fruits, légumes et autres céréales est rapidement fait dans les petites boutiques au bord de la route principale. Le temps de ranger les vivres, installer les enfants sur leurs sièges, Maria s’assoit sur le siège passager avec son maté, et je tourne la clef de contact. Débrayage, je me prépare à passer la seconde (car nous avons bien intégré qu’il ne faut pas utiliser la première, trop puissante pour la cruceta.) Et tout à coup… je me retrouve avec le levier de vitesse dans la main, sorti de son embase… Nos regards se croisent avec Maria, toute aussi ahurie que moi. Et là, en cœur, nous éclatons de rire ! Combien de temps est-ce que cela va durer ?

Après inspection des dégâts, nous constatons sous le soufflet en plastique que le levier tient dans sa base par deux gros picots métalliques. L’un d’entre eux avait visiblement, déjà cassé, et avait été soudé. C’est cette soudure qui vient de céder. La première bonne nouvelle est que si cela a été réparé une fois, cela peut l’être une deuxième. L’autre bonne nouvelle est que je suis toujours en seconde : Donc, on peut rouler… en marche avant ! Mais le soleil est déjà en train de passer derrière les montagnes de Barriloche, alors nous avançons de 100m jusqu’à un terreplein pour passer la nuit. Une pizzeria à quelques pas nous assure le repas de ce soir, accompagnée d’une bonne bière. Demain sera un autre jour !

Stationnés en bord de la route nationale, nous sommes réveillés tôt par le bal des camions. Maria retourne chez l’épicier pour demander un contact de mécano dans le quartier. Celui-ci lui répond qu’il a eu la même aventure et qu’il a roulé en seconde jusqu’à Barriloche dans un centre de soudure qui lui a réparé. Entre temps, l’abuelo Ruben nous confirme également que ce n’est pas grave, et qu’on peut même essayer de passer les vitesses en tenant l’embase du levier.

Maria se souvient alors du trapo (chiffon) de Mario et la cruceta. Elle propose de faire de même caler le levier de vitesse… Et en effet, doucement mais surement, nous enchainons les vitesses sur les 18km qui nous séparent de Bariloche.

Ignacio nous accueille avec son tablier de cuir et son casque. Il jette un œil à la situation sous le tableau de bord et nous dit : «  On va essayer ». En quelques coups d’arc, précis et efficaces, le levier de vitesse retrouve sa position et sa rigidité. Presque trop facile ! Nous remercions Ignacio qui en profite pour visiter la Ama car il l’a trouve très belle. Lui voyage plutôt en famille avec une casa rodante (caravane)

Comme nous sommes à Bariloche, c’est l’occasion de chercher une option pour réparer le convertisseur 12/220V, surtout si nous allons nous poser dans un parc national sans électricité. Et vu la chaleur ambiante, le frigo est essentiel pour préserver nos fruits et légumes quelques jours….L’ami Google nous amène alors chez LE vendeur de panneaux solaires et énergies renouvelables de la ville. Parfait ! Leandro, originaire de La Pampa, nous propose de tester le boitier qui s’avère rapidement être défectueux : court-circuit. Le problème est qu’ils ne proposent pas de réparation sur des produits qu’ils ne connaissent ou ne vendent pas. L’option la plus rapide est d’en acheter un nouveau qu’ils ont en stock. Et sans frigo, difficile de poursuivre sereinement le voyage, alors la décision est vite prise.

Il faut encore l’installer. Et c’est aussi le moment de faire manger les enfants qui commencent à s’impatienter. Leandro nous indique alors un parc avec des jeux et de la pelouse pour un peu de fraicheur. C’est de l’autre côté de la ville, et nous hésitons à faire la traversée avec la Ama, car les rues montent et descendent parfois de façon très raide. Néanmoins, nous écoutons le conseil du local et arrivons au parc sans trop de difficultés. Là, à peine descendus sur le trottoir avec Leno, un papa avec son fils de 3-4 ans sur les épaules m’interpelle. Il me demande d’où nous venons et quel type de voyage nous faisons.

De leur côté, ils voyagent également avec sa compagne, dans un grand bus jaune stationné à quelques pas, et qui mentionne sur le côté « Biblioteca Ambulante ». Maria observe depuis la fenêtre de la Ama avec un grand sourire et m’explique qu’elle connait cette famille, via une interview qu’elle a trouvé sur Youtube alors quelle se renseignait sur les familles qui voyagent en Argentine. Quelle coïncidence !

Ricardo, originaire de Bariloche, et Delfina, de Buenos Aires, ont commencé il y a quelques années à financer leur voyage à travers l’Argentine en organisant des échanges et de la vente de livres d’occasion. Avec l’arrivée de leur fils il y a 3 ans, ils ont acheté et aménagé un grand bus jaune et poursuivent ce projet de bibliothèque ambulante à travers le pays. Le courant passe tout de suite autour d’un maté sur la pelouse. Les enfants jouent ensemble dans le parc et l’après-midi passe rapidement. Ils nous proposent alors de stationner la Ama derrière leur bus, à plat, et de passer la nuit ici. Pourquoi pas ? Nous décidons de préparer une bagna cauda et diner ensemble dans leur spacieux bus. La soirée se poursuit dans la bonne humeur, agrémentée des anecdotes de voyages des uns et des autres.

En rejoignant la Ama tard dans la nuit, nous nous disons que cette belle rencontre n’aurait peut-être pas eu lieu sans nos mésaventures mécaniques et électriques. Cela me soulage un peu, et je me dis que finalement, dans ce type de voyage, il est essentiel de se laisser porter et accueillir le changement, plutôt que de le subir. (Ce qui pourrait être bien vrai dans la vie en général, non ? 😊)