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17- Ripio, vent et poussière : galère

By 2 février 2023février 25th, 2023Ama'ventura

Le temps passe vite quand on s’amuse ! Cela fait déjà une semaine que nous sommes arrivés à Puerto Madryn, et dans 10 jours je décolle pour la France. Nous voulons également être à Mar Del Plata avant le 8 février, pour y fêter les 38 ans de Maria avec ses amis. Il nous reste donc 1100km à parcourir, avec quelques idées de sites à visiter sur la route.

Après une dernière matinée de partage sur la Playa El Doradillo, nous embrassons nos amis et nous lançons la Ama plein nord en direction de Las Grutas. Nous y parvenons vers 22h, mais c’est une ville balnéaire très touristique, et très fréquentée en ce moment : tout ce que nous ne voulons pas. Nous poursuivons alors quelques kilomètres sur le bord de mer jusqu’à trouver un coin calme pour passer la nuit.

Fer et Maru nous ont indiqué un producteur d’huile d’olive. Et vu la quantité que nous consommons, c’est une opportunité de l’acheter par bidons de 5L ! Après avoir dégusté quelques facturas à la dulce de leche pour le petit déjeuner, nous nous arrêtons dans cette ferme pour faire nos achats d’huile, d’olives vertes et noires, et quelques pickles. C’est aussi l’occasion de nous poser à l’abris de grands arbres, car le vent du nord, très chaud, souffle fort. Et nous devons décider de notre itinéraire : La première option est d’aller visiter Punta Perdices, une pointe de sable qui avance dans l’océan, où la plage est couverte de coquillages. Cela nous oblige de faire un détour, mais surtout, c’est un coin devenu très connu et qui doit être gavé de monde en ce moment. OK, on passe. Donc si on choisit de poursuivre la route, à nouveau 2 options s’offrent à nous : Suivre la route nationale N°3 jusqu’à Viedma, ou prendre la route provinciale N°1 sur le bord de mer. Selon Fer, cette piste a été refaite pour inviter davantage de touristes à l’emprunter. Il s’agit donc à priori d’un ripio entretenu régulièrement… mais qui fait potentiellement 200 km entre San Antonio Este et Viedma ! Pas une mince affaire pour notre chère Ama. Oui ? Non ? Aller, c’est parti, on prend le bord de mer !

Les premiers trente kilomètres avant d’arriver directement sur la côte sont plutôt propres et nous rassurent sur notre choix. Mais dès lors que la route s’oriente vers l’Est en bord de mer, avec du vent latéral, nous traversons des zones de terre en « vaguelettes » qui font trembler la Ama dans ses moindres recoins. Et à nouveau, ce sentiment terrible que nous allons perdre une roue, même en roulant à 10 km/h ! Sans parler de la poussière qui ne cesse de s’infiltrer par tous les orifices de la Ama et que l’on respire abondamment…  C’est le moment de s’arrêter pour pique-niquer et profiter de la plage qui s’étend sur au moins 10km entre 2 pointes rocheuses. Autant dire qu’ici, on n’est pas gêné par le monde malgré le fait que ce soit dimanche. Les enfants préfèrent partir à l’opposé de la mer, car ils ont immédiatement repéré de grandes dunes sur lesquelles ils vont grimper. Puis ils reviennent sur la plage et découvrent qu’elle est couverte de grands coquillages blancs et de carapaces de crabes. Ils commencent alors à remplir un seau , puis deux, en disant qu’ils vont les ramener pour les montrer au maître Fred et aux copains de l’école. Ok, alors peut être qu’on va en garder un ou deux… ça suffira ?!

Nous allons nous baigner et jouer dans les vagues. La mer est belle, à bonne température. Mais c’est lorsqu’on revient sur la plage que cela se complique : le vent souffle toujours très fort et difficile de ne pas manger du sable. Maria aurait bien aimé se poser avec un maté, mais ça va être compliqué. Alors nous décidons d’avancer un peu pour nous approcher d’un lieu pour la nuit. Et à 10 km/h sur le ripio, cela risque de prendre du temps !

Nous arrivons finalement à Bahia Creek, une autre plage immense. Celle-ci semble être plus appréciée par les pêcheurs. Et en effet, Maria qui va se mettre à l’eau découvre que ce n’est pas la même ambiance que la précédente : le fond plonge assez brusquement, il y a du courant, et les vagues ne facilitent pas le retour à la plage. Alba et Leno veulent aller se baigner, mais nous leur expliquons que ce n’est pas une bonne idée. De toute façon, le soleil descend sur la mer et la température se rafraichit un peu. Les gens commencent à plier leurs affaires pour rejoindre la civilisation avec leur 4×4, nous offrant à chaque passage un bon nuage de poussière. J’avoue que ça commence à être désagréable.

Mais le superbe coucher de soleil sur la mer nous fait oublier, pour un temps, tous nos tracas. Il semble durer à l’infini, jusqu’à ce que peu à peu, les étoiles s’illuminent dans le ciel. Un autre avantage à être loin de la pollution lumineuse. Maria et les enfants s’installent sur les chaises pliables pour profiter du spectacle, pendant que je tente d’immortaliser ce moment avec mon appareil photo. Mais le vent est toujours violent, peut-être même plus fort que dans la journée, et les enfants veulent se réfugier dans la Ama. Le temps de prendre quelques clichés supplémentaires, Maria va ranger les chaises dans le coffre de la Ama. Je marche alors vers la Ama, et malgré le vent, j’entends un gros bruit, suivi d’un gémissement.

Je fais le tour de la Ama et je trouve Maria qui se tient le front, totalement désorientée, avant de s’allonger sur le bord de la route. Elle vient de se faire assommer par la grosse porte en métal du coffre, que le vent à décrocher. Je me penche sur elle et je vois qu’elle perd connaissance. Quelques voitures passent à 2m de nous, avec leur nuage de poussière, mais aucune ne s’arrête. Bon, il faut dire qu’il fait nuit et que je ne leur fais pas signe. J’inspecte à la frontale le front de Maria qui ne semble pas saigner. J’arrive à lui faire reprendre ses esprits, le temps de la porter jusqu’à la Ama. Là, elle s’allonge sur le sol, entre la table et la cuisinière. Les enfants la regardent inquiets. Je ne suis pas très serein non plus, d’autant qu’elle ne cesse de s’évanouir, et je la ramène à nous en lui tapotant le visage. Elle finit par s’assoir à table, et nous arrivons à partager un repas, bercés par le vent qui secoue la Ama. Mais elle a vraiment été secouée et une grosse bosse est sortie sur le haut de son front. Une fois que tout le monde est couché, je me dis que plus vite nous sortirons de ce ripio côtier, et mieux ce sera pour tout le monde.

Le lendemain, avant que les enfants ne se réveillent, nous reprenons la piste sur laquelle nous nous faisons encore bien secouer. Et ce n’est pas pour aider Maria qui a un gros mal de crâne… Il nous reste plus de 100km jusqu’à Viedma, et je ne sais pas dans quel état nous allons en sortir si nous devons avancer ainsi à 10 km/h, dans la poussière et les vibrations. Nous approchons de La Loberia, un petit village où nous avions envisagé de passer une nuit. Je me dis que nous pouvons au moins y faire une pause petit déjeuner. Et là, la piste devient asphalte ! Ouf, un peu de répit… Mais parfois de courte durée, car il se peut que ce soit seulement dans l’agglomération. Curieux, je continue et je me rends compte que oui, la route reste goudronnée même à la sortie du village. Avec un peu de chance, c’est la fin du calvaire, et nous pouvons tracer jusqu’à Viedma, pour nous mettre à l’abris du vent et de la poussière.

Le long de la route, des dizaines de perroquets verts et bleus sont posés sur les fils électriques, bec face au vent et pattes bien serrées sur le fil pour ne pas se faire emporter. Je me sens tellement détendu d’avoir retrouvé l’asphalte, que plus rien ne semble pouvoir me perturber. Par la fenêtre, je regarde défiler la plaine aride, quand tout à coup je mets le pied sur les freins : des nandus ! Tout un groupe est là, à 30m de la route, une mère et quelques petits, dont les plumes se font gonfler par les rafales. Plus loin derrière eux, des adultes courent à grande vitesse, le cou tendu et leurs pattes puissantes en action. Il ne manque plus que le coyote ! Beep ! Beep ! 😊

Nous nous posons à Viedma, dans un parc arboré au bord du Rio Negro. Petit déjeuner, maté, détente sur la pelouse. Que c’est bon de ne plus se faire souffler dans les bronches ! J’en profite pour sortir et nettoyer une banquette qui s’est arrachée avec les vibrations. Toute la vaisselle est à laver aussi, couverte de terre. Je ne parle même pas des lits et des draps. Mais pour le moment, on fera avec car cela demande d’être un peu plus posés. Je me rends aussi compte que le pneu de la roue avant droite est à la corde : un câble est apparent et commence même à s’effilocher. Hum… Pas terrible

La solution est de la remplacer par la roue de secours, en bien meilleur état, d’ici à ce que nous en achetions une nouvelle. Nous nous arrêtons alors dans une gomeria car je ne veux pas m’embêter à sortir le cric. Trois jeunes se lancent alors dans l’opération, mais ils galèrent à desserrer les écrous de la roue. En plus, des bourrasques de vent lèvent de la terre qui vient nous gifler le visage. C’est la vraie tempête ! En plus, je commence à stresser car je les vois forcer comme des ânes, et j’ai peur que quelque chose casse… Et puis l’un d’entre eux suggère que le filetage des écrous est inversé. Et Bingo ! Je n’aurais jamais pensé à ça… 10 min plus tard, la roue est changée et nous repartons. J’avance doucement dans la rue qui quitte la gomeria, et Maria finit de donner des nectarines aux enfants qui ont faim. Je ralentis en approchant un dos d’âne, mais je réalise au dernier moment qu’un gros caniveau traverse la rue juste avant, et par réflexe, je pile. La Ama s’arrête net, et Maria s’envole pour venir atterrir tête première dans le dossier du fauteuil passager. Après le front hier soir, c’est l’arrière de la tête et le dos qui viennent de taper. Plus de peur que de mal. Mais bon, on se passerait bien de ce genre de mésaventure.