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10- Un grand besoin de détente

By 8 février 2023février 25th, 2023Ama'ventura

A ce point du voyage, on pourrait croire que nous avons accueilli ces quelques (més)aventures dans le calme et la sérénité, tels des maîtres Yogi dont rien ne peut venir altérer l’équilibre mental et émotionnel… Et bien ce serait vous raconter des salades !😊 En effet, au moins en ce qui me concerne, je n’ai pas très bien vécu ces 10 premiers jours sur la route. Nous avons clairement eu quelques montées de stress, qui, avec du recul, reflètent un peu notre histoire familiale récente.

Pour rester dans l’illustration, je dirais qu’au cours de ces 4 dernières années, nous avons traversé de véritables montagnes russes : découverte de la parentalité, manque de sommeil, santé, réorganisation professionnelle, remises en questions personnelles, travaux dans la maison, le tout baigné plus récemment dans une actualité mondiale oppressante (même quand on fait tout pour s’en protéger). Bref, on a clairement frôlé l’implosion début 2022. Heureusement, nous avons eu assez de lucidité sur notre situation pour identifier, entre autre, qu’après 10 ans en France, Maria avait un réel besoin de renouer avec ses racines Argentines (Dont les liens ont pris un sacré coup depuis 2020 avec les limitations de déplacement). C’est pourquoi nous avons décidé de tenter un rééquilibre du temps familial passé entre les 2 pays. Et de fils en aiguilles, nous en sommes venus à imaginer et construire ce voyage.

Sur le papier, c’est plutôt idyllique : une famille, une maison à roulettes et l’envie de parcourir les vastes étendues d’Amérique Latine. Mais la réalité est que nous découvrons totalement ce mode de voyage, à 4 dans 12m², avec deux enfants adorables mais qui, à 4 et 6 ans, n’ont pas toujours la capacité de réaliser leur chance et relativiser les moments inconfortables (ce qui est tout aussi vrai pour nous !). S’ajoutent à cela les aléas mécaniques, un peu de chaleur, quelques moustiques et des nuits pas toujours reposantes. Tous les ingrédients sont alors réunis pour mettre la cocotte-minute sous pression, et il ne reste plus qu’à attendre un ou deux événements mineurs (mais déclencheurs) pour atteindre le BOUM !

Un premier est arrivé à Villa La Angostura. Alors que nous venons de terminer le repas de la mi-journée et en attendant que le soleil descende pour aller au lac, nous décidons de donner un peu d’amour à la Ama, en la nettoyant et en finissant de décoller quelques vieilles vignettes qui obstruent les coins du pare-brise. L’extérieur de l’habitacle est décoré avec des plaques de vinyle aux formes anguleuses, et on peut lire « Motorhome » en grosses lettres noires sur les 4 coins du véhicule. Je ne trouve pas cela très esthétique… mais nous avons convenu avec Maria que nous essaierons de lui faire une déco à notre goût l’an prochain, car pour cette année, il y avait clairement d’autres priorité. Pourtant ces lettres noires m’agacent, alors je commence à en gratter une, puis deux, et finalement le 1er motorhome à l’arrière se détache facilement. Plutôt content, je me laisse emporter par l’élan et je décolle les 2 sur les côtés. Là, le rendu est plus mitigé car la peinture a jauni et on voit les traces des lettres blanches… Je sens que cela ne plait pas trop à Maria, mais elle ne dit rien. A ce moment, le bon sens serait d’arrêter ?!.. Mais non, je me dis qu’à y être, je peux finir avec le dernier, collé sur l’avant de la capucine… Le M sort sans laisser de trace. Nickel ! Je continue avec le O et là, carnage : la peinture s’arrache avec le vinyle et laisse apparaitre la base métallique. Et merde…. Je me fonds en excuses, mais ce qui est fait est fait. Nous avons désormais un magnifique « TORHOME » à l’avant de la Ama, et une certaine perte d’harmonie dans notre couple, pour le dire gentiment 😊

Un deuxième « détonateur » s’offre à nous dès le lendemain, alors que nous quittons Villa La Angostura dans l’idée de rejoindre Villa Traful. Pour cela, il faut suivre la route 40 qui monte vers San Martin de Los Andes, puis rejoindre une piste de ripio le long du lac Traful sur environ 30km. Moni et Emi vont également passer par là, mais ils continueront leur route pour rejoindre Santa Rosa dans la foulée. Nous y resterons si tout va bien quelques jours car Maria y a trouvé un camping qui semble magnifique, avec plage de sable blanc et eaux turquoises.

Les premiers kilomètres sur la route 40 sont très agréables. Malgré quelques belles montées et descentes qui font souffler la Ama, la route est belle, asphaltée, et je profite du superbe paysage qui déroule par la fenêtre. Les enfants sont à leur place et ne tardent pas à s’endormir. Maria, s’installe à l’arrière, sur leur lit, pour admirer la vue avec un bon maté. Une manière de nous donner aussi un peu d’espace. Un panneau indique « Villa Traful » dans un virage en épingle que je négocie en une fois malgré un rayon de braquage trèèèès large. Yes ! Puis nous engageons directement sur une piste qui monte fort dans la forêt. En seconde, le moteur est largement assez puissant pour nous tirer vers le haut, mais l’habitacle tremble fort. Tout à coup, un gros bruit de frottement mécanique attire mon attention, comme si du gravier s’était invité dans la boite de vitesse…. Dès que la pente s’adoucie, je passe la troisième et le bruit diminue, voir même disparait (peut être couvert par celui du moteur et de tout le reste…). Je n’ai pas trop le temps de m’inquiéter davantage du bruit, qu’arrive une descente bien raide ou la seconde est de rigueur. Je serre alors les fesses et gère au mieux la vitesse au frein moteur car je sens que la gravité ne demande qu’à ce que tout s’emballe ! S’en suit un peu de répit sur du plat, mais c’est de courte durée et nous repartons de plus belle dans les montagnes russes. Par moment, la piste est à flanc de falaise, pas très large, avec des trous énormes qui nous font tanguer. Et pour couronner le tout, nous croisons régulièrement des pick-up qui m’obligent à me rapprocher du bord, alors que je n’ai pas encore bien le gabarit en tête.

A ce point du trajet, je me demande si c’est une bonne idée de continuer, au risque que cela empire. Mais j’avoue que je suis tout autant inquiet à l’idée de faire demi-tour, car je doute que la Ama puisse remonter certaines pentes sans perdre sa motricité sur la terre. Bref, je n’ai pas envie d’essayer, alors je réenclenche la seconde et reprends la route. J’enchaine encore quelques sueurs froides en croisant d’autres véhicules, mais peu à peu la route s’adoucit au niveau du lac et nous finissons par arriver enfin à Villa Traful. Je me gare face au lac et je sens mes épaules et mes bras doucement se détendre. Pffffffffffff…c’était chaud !

Maria n’a clairement pas non plus apprécié le voyage. Elle est restée tout du long à l’arrière, à se faire encore plus chahuter du fait que le lit des enfants est surélevé. Nous avons tous les deux subi la route, sans communiquer, bloqués dans notre stress respectif. Je réalise en plus que nous avons passé le fameux camping qu’elle avait repéré sur internet, 7 ou 8 km plus en amont. Et vu l’état de la route, pas question de faire demi-tour !! L’ambiance n’est clairement pas détendue… et si nous continuons sur cette voie, nous ne donnons pas cher de la suite du voyage qui risque de couper beaucoup plus court que prévu…

Nous faisons au moins le constat commun que nous avons besoin de nous poser. Vraiment ! Et de ne plus toucher la Ama de plusieurs jours. Oublier la mécanique et les soucis logistiques pour profiter de l’endroit. C’est un bon programme. Il ne reste plus qu’à trouver le bon spot. Je pousse alors la porte d’un petit centre de plongée, et le boss, chapeau en cuir sur la tête et maté à la main semble avoir lu dans mes pensées.

Et il me dit : « 5 km plus à l’Est, il y a un camping au pied d’une montagne, les pieds dans l’eau. Et si tu t’y arrêtes pour une nuit, tu y resteras au moins une semaine ! »